Olivier Marleix : « Emmanuel Macron ne sait pas où il va, nous si ! »
Le chef de la droite à l’Assemblée voit la menace de motion de censure comme une « arme de dissuasion ».
Une trentaine de parlementaires du parti présidentiel veulent mettre LR face à ses responsabilités tout en dénonçant son manque de fiabilité. Que leur répondez-vous ?
Nous n’avons aucun compte à rendre ni à M. Macron ni à ses députés. Contrairement à eux, nous savons où nous allons. Ma feuille de route est claire depuis le premier jour: les LR seront au rendez-vous de leurs propres convictions sur la maîtrise de l’immigration, le rétablissement des peines planchers, la réduction de la dépense publique… M. Macron ne doit pas nous faire porter le chapeau de son absence de cap : il ne sait pas où il va, nous si.
Un accord avec la macronie est-il néanmoins possible ?
Le président doit enfin accepter cette cohabitation avec l’Assemblée nationale qu’ont voulue les Français. Il ne peut pas y avoir d’accord global avec ce gouvernement parce que nous sommes en désaccord sur l’immigration, sur l’absence de politique pénale ferme, sur l’explosion de la dette, sur leur soumission à l’écologie radicale. Par aveuglement, ils ont créé une véritable crise du logement, en refusant, contraints par les écologistes, de lancer de nouvelles constructions, y compris dans le monde rural.
Où en sont les discussions avec le gouvernement sur l’immigration ?
Elles sont au point mort. Les discussions s’engageront au Sénat sur notre texte en octobre. On ne va pas tomber dans le marchandage.
Certains, y compris chez LR, estiment que, pour gouverner le pays, il est nécessaire de trouver des convergences avec le camp présidentiel.
Je leur réponds que, si la situation est préoccupante, c’est à cause d’Emmanuel Macron. Par calcul, il a suscité une extrême gauche très puissante et un Rassemblement national très fort. La configuration de l’Assemblée donne un avant-goût des risques politiques qui menacent aujourd’hui notre pays. C’est au président de gouverner différemment. Je ne crois pas au bricolage gouvernemental, qui n’intéresse personne.
Vous avez rencontré Nicolas Sarkozy, vendredi dernier. Vous a-t-il éclairé sur les intentions d’Emmanuel Macron ?
Nicolas Sarkozy a dit à Emmanuel Macron que le pays est à droite et qu’il fallait gouverner à droite. Mais je ne crois pas que le chef de l’État, après avoir perdu le législatif, soit prêt à perdre l’exécutif. Que lui resterait-il s’il devait nommer un premier ministre de droite : inaugurer les chrysanthèmes ? Je ne crois pas que ce soit son intention.
La droite brandit la menace d’une motion de censure sur l’immigration et le budget. Est-ce une vraie possibilité ?
Nous ne sommes pas là pour bloquer les institutions. En revanche, il y a des lignes rouges sur lesquelles on ne les laissera pas avoir recours au 49.3 impunément. C’est une arme de dissuasion.
Richard Ferrand, ex-président de l’Assemblée, a déclenché une polémique en évoquant l’idée d’une révision constitutionnelle pour ouvrir la possibilité d’un troisième mandat présidentiel. Qu’en pensez-vous ?
Sans doute sa contribution aux cent jours d’apaisement… J’ai du mal à saisir cette provocation. Emmanuel Macron n’a aucune majorité possible pour réviser la Constitution.
Vous sentez-vous responsable des divisions de votre groupe lors des retraites ?
Il n’y avait pas de désaccord au sein de notre groupe sur le fait qu’il faut travailler davantage dans ce pays. Le contexte de notre élection pour la présidence LR n’a pas aidé à l’unité, mais, au fond, le seul responsable des divisions du pays sur cette réforme, c’est Emmanuel Macron lui-même, qui ironisait en 2019 sur le décalage de l’âge légal de départ à 64 ans en souhaitant «bon courage déjà pour arriver à 62 ans».
Y a-t-il une différence à vos yeux entre LFI et le RN ?
Certains ont des chemises repassées et des cravates… Plus sérieusement, j’observe que les élus de La France insoumise se comportent en anarchistes. Ils ne se cachent pas de vouloir détruire les institutions de la Ve République. Quant au RN, il a beaucoup communiqué sur le fait qu’il se tenait sagement dans l’Hémicycle, mais, au fond, à quoi servent les 88 députés du Rassemblement national ?
Que pensez-vous de l’idée d’Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée, visant à modifier certaines présidences de commissions, comme celle d’Éric Coquerel aux finances ?
S’il y a autant de députés RN et LFI, c’est du fait de M. Macron. Nous, chez LR, nous sommes démocrates et nous respectons la configuration de l’Assemblée telle que les Français l’ont désignée.
L’ancien premier ministre Dominique de Villepin critique la droitisation de LR, qu’il qualifie d’« erreur stratégique ». Une réponse ?
Les Français attendent clairement que la droite n’ait pas d’états d’âme sur l’immigration et l’insécurité, qui sont les fondements essentiels de notre unité nationale.
Le fait que les trois plus grandes associations d’élus (régions, départements et maires) aient boudé les Assises des finances publiques de Bruno Le Maire lundi vous surprend-il ?
Après un quinquennat marqué par un laxisme budgétaire incroyable, nous constatons que l’aggravation de la dette sous Emmanuel Macron (+ 700 milliards) est pire que ce qui s’est fait sous François Hollande. Ce seul constat pourrait justifier à lui seul que l’on n’ait pas envie de s’associer à une telle faillite. Ce n’est pas aux Français de payer, avec l’annonce récente par exemple du déremboursement des frais dentaires, la facture de ce laisser-aller.
Vous considérez-vous comme un anti-macroniste pur et dur ?
Son discours de dépassement des clivages était un projet marketing, mais sa vraie stratégie a consisté à faire monter les extrêmes pour favoriser sa réélection. C’est ce qui me heurte profondément, car, pour moi, un président de la République doit garantir l’unité nationale. Ce sentiment d’affrontement entre un bloc identitaire et un bloc populaire est délétère. Le grand défi de la droite consiste à identifier les leviers pour reconstruire une cohésion nationale. Elle passe par l’identité, la sortie d’une vision mondialiste de l’économie et le redressement des trois services publics essentiels que sont l’école, l’hôpital et la justice. C’est cette vision alternative que nous construisons pierre par pierre à l’Assemblée.
>> Lire l’interview sur LeFigaro.fr
L’article Olivier Marleix : « Emmanuel Macron ne sait pas où il va, nous si ! » est apparu en premier sur les Républicains.