Alexandre Portier : « Un an après son arrivée, qu’a fait Pap Ndiaye ? »
Après un an à la tête du ministère de l’Éducation nationale, le bilan de la politique de pap Ndiaye est maigre, déplore Alexandre Portier, député LR du Rhône. Il souligne l’inaction du ministre face à la menace de l’entrisme islamiste à l’école et la baisse du niveau des élèves.
En poste depuis un an rue de Grenelle, Pap Ndiaye accumule les revers et son bilan est maigre. Régulièrement désavoué au sein de l’exécutif et de la majorité, le ministre porte une politique dont la cohérence ne saute pas aux yeux : bien timorée face aux difficultés structurelles de l’École mais non moins subversive sur le plan idéologique.
Factuellement, et très paradoxalement, l’essentiel du bilan de Pap Ndiaye n’est pas le sien. C’est au mieux celui de l’Élysée. Pour preuve la réforme du lycée professionnel, présentée par Emmanuel Macron lui-même à Saintes le 4 mai dernier. Tout un symbole ! Sans expérience politique ni connaissance du système éducatif, Pap Ndiaye n’est que le co-pilote discret d’une réforme qu’il n’a pas initiée. Le maître d’œuvre de cette réforme est bien Jean-Marc Huart, le directeur de cabinet que le président a imposé à son ministre de l’Éducation nationale et qui est précisément un expert de la voie professionnelle. Conséquence logique de ce désaveu : aucun projet de loi n’est prévu pour porter cette réforme, signe non seulement d’un mépris pour le Parlement mais aussi d’un manque d’ambition et de courage que l’on peine à dissimuler.
C’est pourtant bien à Pap Ndiaye, officiellement en charge de l’Éducation nationale que doit revenir la tâche de formuler un diagnostic et de définir un projet de réforme en profondeur du système éducatif. À personne d’autre. Après quelques mois d’absentéisme médiatique (il s’est rattrapé depuis), le ministre s’est résolu à exposer dans une tribune du Monde sa vision des maux dont pâtit notre École : baisse du niveau des élèves, absence de mixité sociale, déclin de l’attractivité du métier de professeur. Sur chacun de ces trois points cependant, les actions initiées depuis s’avèrent particulièrement décevantes.
S’agissant du faible niveau des élèves français et de la crise de recrutement des professeurs, deux enjeux cruciaux pour le système éducatif et l’avenir du pays, le diagnostic formulé par Pap Ndiaye demeure superficiel et ses propositions sont inconsistantes.
Bien qu’il prétende s’inscrire dans la continuité de l’action conduite par Jean-Michel Blanquer, lequel avait mis l’accent sur l’enseignement primaire pour redresser le niveau, Pap Ndiaye est plus flottant dans son diagnostic. Il estime en effet que « le collège est l’homme malade du système », ce qui est objectivement faux. Le mal est à l’évidence en amont. Les études PIRLS et TIMSS, qui évaluent le niveau des élèves à 10 ans, en lecture pour l’une, en sciences et mathématiques pour l’autre, montrent que la France se situe en queue de classement des pays de l’Union européenne évalués. Par contraste, sans que les résultats soient pour autant très flatteurs, la position relative des élèves français s’améliore sensiblement durant les années de collège. La seule mesure concrète proposée par Pap Ndiaye concerne la classe de sixième : on voit mal cependant comment le fait de charger les professeurs des écoles de quelques heures de soutien en classe de sixième pourrait permettre de remédier aux lacunes des élèves sortant de l’école primaire en situation d’échec.
Pour remédier à la crise de recrutement des professeurs, Pap Ndiaye ne propose rien car il ne dispose en réalité d’aucun diagnostic sérieux. Il se borne à suivre son administration, laquelle s’efforce de mettre en musique la promesse électorale d’Emmanuel Macron de revaloriser sans condition de 10% les enseignants. Sauf que le compte n’y est pas : ce n’est ni 10% ni sans condition. Sur le terrain, la pilule ne passe pas. Pourquoi ? Parce qu’elle repose sur une duperie, et qu’aucune politique ne peut être fondée sur le mensonge. La première chose que méritent nos enseignants, c’est une parole de vérité, un cap clair, transparent, sans filouterie. Le «pacte» dont les signataires s’engageraient à consacrer 18h par an aux «nouvelles missions», principalement aux remplacements de courte durée, est une mesure purement technocratique qui ignore les réalités du terrain, le désordre grandissant et l’accumulation des tâches non rémunérées qui découragent les professeurs, générant absentéisme, démissions et baisse du nombre de candidats aux concours de recrutement.
On ne peut toutefois reprocher à Pap Ndiaye d’être inerte. L’idéologue qui sommeille en lui s’est réveillé pour le conduire à infléchir, voire à inverser la politique suivie par son prédécesseur. Sous des dehors modérés, Pap Ndiaye est en effet un intellectuel radical, témoignant dans ses écrits sur les États-Unis de sa sympathie pour le mouvement Black Lives Matter, et dans ses écrits sur la France de son hostilité à l’égard du modèle républicain. Il n’y a donc pas lieu d’être surpris par la nature de ses engagements en matière de mixité sociale et de laïcité.
Le ministre s’est notamment donné comme priorité d’agir en faveur de la mixité sociale, un marqueur de gauche s’il en est. En prenant pour cible l’école privée, le ministre a toutefois commis, par dogmatisme idéologique, une erreur de diagnostic. La séparation sociale est d’abord spatiale et résulte de la stratégie résidentielle des familles. Ce dont témoigne par exemple le fait que les familles quittent les quartiers les plus défavorisés dès qu’elles en ont les moyens. Cessons l’hypocrisie : les parents veulent juste pouvoir choisir le meilleur pour leurs enfants, comme Pap Ndiaye lui-même, qui scolarise les siens à l’École alsacienne. Pourquoi reprocher aux autres ce qu’on cherche à obtenir pour ses propres enfants ? Cette schizophrénie est hallucinante. La réalité, c’est que la moitié des familles utilisent à un moment ou à un autre les deux secteurs pour au moins l’un de ses enfants. Le ministre ferait mieux de concentrer ses efforts sur le mal réel, l’échec scolaire, en garantissant l’ordre et l’exigence sur tout le territoire, plutôt que de combattre une maladie imaginaire.
L’unique tentative du ministre de sortir du bois pour proposer une réforme de son cru s’est en outre soldée par un échec cuisant. Le protocole d’accord signé le 17 mai dernier avec l’Enseignement catholique est purement incitatif et pourrait même être contreproductif, risquant d’affaiblir les collectivités locales, contraintes de prendre en charge les frais de transports et de cantine scolaires des élèves boursiers nouvellement inscrits dans le privé, ainsi que les collèges publics des quartiers populaires, susceptibles de perdre certains de leurs meilleurs élèves.
Le plus grave est peut-être la rhétorique idéologique employée par le ministre qui, dénonçant la « ségrégation scolaire », suggère l’existence d’un apartheid délibéré. C’est cette même grille de lecture de la société, celle de la sociologie de la domination, que le ministre applique au dossier de la laïcité. En tant qu’intellectuel, Pap Ndiaye a contribué avec d’autres à propager le concept de «discrimination systémique», un concept aujourd’hui exploité par les islamistes pour dénoncer «l’islamophobie» des institutions républicaines. L’École vit en permanence sous la menace de ce type de tentatives de déstabilisation, comme les événements qui ont conduit à l’assassinat de Samuel Paty en ont fourni une tragique illustration. Dans un tel contexte nécessitant le maintien d’une ligne de fermeté, la nomination de Pap Ndiaye n’était sans doute pas le meilleur choix.
Les craintes exprimées au moment de la nomination de Pap Ndiaye se sont depuis confirmées. Cédant à son penchant idéologique, le ministre s’est efforcé d’affaiblir le Conseil des sages de la laïcité qu’avait mis en place Jean-Michel Blanquer pour favoriser la cohésion de l’institution face à la menace de l’entrisme islamiste : la réforme du Conseil, tout en diluant ses missions, a notamment privé celui-ci de sa capacité à s’autosaisir. Plus grave encore, Pap Ndiaye, confronté à l’offensive des «abayas», renoue avec la pratique du «cas par cas» qui prévalait avant le vote de la loi de 2004 sur les signes religieux à l’école. Le ministre Pap Ndiaye chargé de mettre en œuvre une loi que l’intellectuel Pap Ndiaye réprouve, a choisi de se décharger de cette responsabilité sur les chefs d’établissement.
Mélange de prédication médiatique et d’inaction politique, le «Papisme» n’est pas à la hauteur des défis que notre École doit relever. Au mieux, Pap Ndiaye fait de la figuration ; au pire, lorsqu’il tente de rallumer la guerre scolaire et hisse le drapeau blanc face à l’obscurantisme islamiste, il fragilise l’institution dont il a la charge. Au bilan de cette première année, rien, nada, néant, aucune avancée et même des reculades : oui, le «Papisme» est un nihilisme.
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