Gérard Larcher : « Le Sénat rétablira la réforme des retraites »
Pour le président de la chambre haute du Parlement, le Premier ministre Sébastien Lecornu regarde un peu trop « du côté des socialistes ». Rendant à ce stade impossible pour le Sénat de voter le budget.
Alors que l’examen du Projet de loi de finances (PLF) a commencé dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, le président du Sénat souhaite que la France ait un budget au 31 décembre mais prévient qu’« il n’est pas question d’accepter n’importe quoi » pour autant.
Gérard Larcher presse par ailleurs Emmanuel Macron de ne plus s’immiscer dans le débat, notamment sur la question des retraites, « Le désordre, c’est lui qui l’a créé », appuie-t–il dans une allusion à la dissolution.
Le Sénat est-il prêt à voter un budget qui inclut la suspension de la réforme des retraites ?
Soyons clairs, le budget présenté aujourd’hui n’est pas acceptable. La diminution de la dépense publique est totalement insuffisante. Et l’on ne parle plus que de dépenses, d’impôts et de taxes. Mais regardons autour de nous en Europe, beaucoup d’autres pays sont revenus à l’équilibre de leurs finances publiques. Nous sommes les derniers à ne pas l’avoir fait ; la France doit tenir sa parole d’un retour du déficit à 3 % du PIB en 2029. Ce qui n’interdit pas la recherche d’une plus grande équité fiscale.
Aura-t-on un budget au 31 décembre ?
Je le souhaite, mais il n’est pas question d’accepter n’importe quoi ! On ne nous parle plus de la suppression d’un certain nombre d’agences, du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, de l’AME, et j’en passe… Depuis mai, le Sénat avec les groupes de la plate-forme commune, les deux rapporteurs généraux et les rapporteurs, travaille à une proposition de budget avec 32,5 milliards d’économies. Une chose est sûre, le Sénat utilisera pleinement les quinze jours de débat auxquels il a le droit constitutionnellement pour examiner le PLFSS. L’Assemblée doit donc tenir ses propres délais.
Vous trouvez que Sébastien Lecornu négocie trop avec les socialistes ?
Il est clair que le Premier ministre regarde surtout du côté des socialistes ! Il a abandonné le 49.3 comme un cadeau de Noël, mais les socialistes en demandent et en demanderont toujours plus : suspension de la réforme des retraites, taxe Zucman… et vendredi encore un nouvel ultimatum d’Olivier Faure et de Boris Vallaud. A un moment il faut que tout cela s’arrête ! Durer « quoi qu’il en coûte », ce n’est pas l’intérêt de la France. Nous devons tous être la hauteur des enjeux, le Sénat le sera. Je dis à Emmanuel Macron comme à Sébastien Lecornu qu’ils n’oublient pas, lors de leurs prochaines consultations d’inviter les présidents des groupes parlementaires du Sénat et de respecter le bicamérisme !
Emmanuel Macron a évoqué le « décalage » de la réforme des retraites, Sébastien Lecornu parle, lui, de « suspension ». Que comprenez-vous ?
Désormais le président de la République s’exprime souvent… de l’étranger. Il nous a indiqué que le désordre était créé par les partis politiques. Le désordre, c’est lui qui l’a créé ! Il vient essentiellement de cette décision folle de dissoudre l’Assemblée nationale. Que chacun, et le chef de l’Etat notamment, assume ses responsabilités. Que veut dire un décalage ? C’est dire aux jeunes générations : quelle retraite aurez-vous ? Emmanuel Macron a renoncé aux deux réformes majeures de ses mandats : celle sur la compétitivité des entreprises et les retraites. Il ne peut pas ignorer dans quelle situation est la France, ce qui nous empêche de compter en Europe. Le Sénat rétablira la réforme des retraites. Nous la votons depuis cinq ans. Je rappelle que son abandon, c’est 30 milliards de déficit en 2035. Nous ferons des propositions sur la décentralisation, nous y travaillons depuis 2020. C’est aussi une manière de diminuer les dépenses publiques. J’apporterai notre contribution au Premier ministre le 31 octobre.
Moody’s n’a pas dégradé la note de la France vendredi. Est-ce un répit pour le gouvernement Lecornu ?
Après la dégradation de la note de la France par Fitch et S&P, Moody’s la maintient mais place la France sous perspective négative, ce qui veut dire qu’elle peut être dégradée dans les deux-trois mois qui viennent si le sérieux budgétaire n’est pas au rendez-vous. Ce n’est que la conséquence de l’incapacité de notre pays à se réformer, à réduire sa dépense publique et à respecter ses engagements. Ça ne me réjouit pas ! Car tout cela a des conséquences financières. Désormais, c’est 310 milliards qu’il faudra lever sur les marchés en 2026 pour financer le déficit public.
Comment expliquer aux Français que vous sanctionnez des ministres LR qui siègent au sein du gouvernement Lecornu… quand vous défendiez la participation à tous les gouvernements depuis plus d’un an, dont Lecornu 1 ?
Nous avons collectivement décidé en bureau politique de ne pas participer au gouvernement Lecornu en jugeant que nous ne nous y retrouvions pas. La déclaration de politique générale n’a fait que le confirmer : nous voyons un budget largement imposé par la gauche qui ne correspond pas à nos fondamentaux : la réduction de la dépense publique est insuffisante et les impôts continuent d’augmenter. Il n’y a rien eu sur la sécurité, la politique migratoire. Quant aux ministres LR, j’ai dit que j’étais pour leur suspension mais pas leur exclusion. La question pourra se reposer après le débat sur les lois de finances.
Bruno Retailleau s’est-il isolé dans la séquence ? C’est toujours le candidat de LR pour 2027 ?
Nous n’en sommes pas là. C’est le président des Républicains, il a été largement élu à la tête de notre parti, il a la confiance des adhérents, de nos instances. Il a ma confiance.
Est-ce que, comme lui, vous auriez dit : « Pas une voix pour la gauche » entre une candidate PS et un UDR, allié du RN ?
La position a été très claire en bureau politique ni soutien à LFI ni soutien au RN. C’est ma ligne. Pour ce qui est du PS, son alliance avec LFI pose question.
Etait-ce vraiment la ligne de Bruno Retailleau ?
Il a réaffirmé cela jeudi, ni soutien à LFI ni au RN. Je suis contre l’union des droites. D’ailleurs, je ne sais pas ce que cela veut dire, le RN a un programme de gauche.
Rachida Dati, ministre LR mais suspendue par le parti, est-elle toujours votre candidate pour Paris ?
Rachida Dati a été investie par les Républicains. Elle est celle qui peut nous faire gagner Paris et arrêter le désastre auquel nous a conduit Anne Hidalgo.
Deux policiers vivent dans la cellule à côté de celle de Nicolas Sarkozy. Ça vous choque ?
Je trouve ça naturel et indispensable. Ce procès pose de nombreuses questions, comme l’exécution provisoire qui est nécessaire dans un certain nombre de cas mais qui doit être mieux encadrée notamment pour protéger la présomption d’innocence. Il faudra poser sereinement le débat.
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