Antoine Vermorel-Marques : « La droite ne doit pas devenir la sous-traitante d’Eric Ciotti et de Marine Le Pen »
Dans un entretien au « Monde », le député de la Loire Antoine Vermorel-Marques combat l’idée, qui monte ces dernières semaines, d’une « union des droites » entre son parti, Les Républicains, et le Rassemblement national.
Alors qu’Eric Ciotti (président de l’Union des droites pour la République) propose à son homologue du parti Les Républicains, Bruno Retailleau, une rencontre dans l’optique de rejoindre l’alliance avec le Rassemblement national, certaines voix s’élèvent à droite pour dénoncer tout rapprochement possible. C’est le cas d’Antoine Vermorel-Marques, vice-président du parti et du groupe Droite républicaine à l’Assemblée nationale. Le jeune élu appelle son parti à réaffirmer ses différences avec l’extrême droite.
On entend comme une petite musique autour d’un rapprochement possible avec le RN. Cela vous inquiète-t-il ?
Je veux défendre une droite indépendante et non pas une droite qui serait la sous-traitante d’Eric Ciotti ou de Marine Le Pen. Nous avons trop de différences avec eux, mais aussi trop de force pour aller se brader à un parti qui a toujours été notre adversaire politique. Le Front national puis le RN ont toujours eu la volonté de nous cannibaliser. Ce n’est pas une union des droites, c’est une absorption de la droite gaulliste dans l’extrême droite.
Quand il présidait encore LR, Eric Ciotti n’a pas été suivi en 2024, au moment de son alliance avec le RN. Malgré son échec, la question reste toujours d’actualité. Pourquoi ?
Je note que ce sujet revient sur la table quand la droite est faible. Les raisons qui ont poussé Eric Ciotti dans les bras du RN peuvent se reproduire. Parce qu’il s’agit de raisons vénales, d’intérêts personnels. Quand on est plus attaché à son poste qu’à ses idées, on est prêt à toutes les renonciations. D’ailleurs, il continue à avaler des couleuvres. Il soutient la candidate la plus étatiste à l’élection présidentielle tout en s’affichant avec la tronçonneuse ultralibérale de Javier Milei [le président argentin].
Dire que le programme du RN est de gauche suffit-il à marquer une différence entre la droite et l’extrême droite ?
La droite a un ADN économique, libéral, de rigueur budgétaire et d’attachement aussi au projet européen. Ce sont nos marqueurs. Or, la droite est forte quand elle est capable de mettre un vrai projet sur la table. Et c’est ça qui se joue aujourd’hui d’ailleurs. On peut être ferme et droit dans nos convictions sans être extrême.
Vous parlez de demande. Or, les sympathisants LR ne souhaitent-ils pas cette union, comme le laisserait penser un récent sondage publié par « Valeurs actuelles » ?
Je pense surtout qu’on a oublié de montrer nos différences à nos électeurs. Ils n’attendent pas un programme étatiste et russophile comme celui de Marine Le Pen. Je rappelle que le programme économique du RN en 2024 a été chiffré par l’Institut Montaigne à 85 milliards d’euros. C’est diamétralement opposé à ce que nous proposons. Sur l’Europe, après avoir voulu la quitter, [les lepénistes] veulent la saborder en coupant les contributions nationales et je ne parle pas de leurs ambiguïtés sur Vladimir Poutine. Sur la question de l’assistanat, on doit intensifier ce combat d’idées face au RN. Voilà un parti qui cherche à capter la voix du boulanger et de l’artisan, mais aussi de celui qui refuse de travailler. C’est pour cela qu’ils ont voté contre les quinze heures d’activités pour les personnes au RSA. Nous avons été trop faibles ces dernières années à montrer leurs incohérences. Leurs masques doivent tomber.
Pourquoi les LR ne rappellent-ils pas davantage qu’ils n’ont pas les mêmes valeurs et la même histoire ?
Pour moi, il ne s’agit pas d’un discours ringard. Ces gens-là [au RN] n’ont pas complètement tourné le dos à leur histoire. La preuve en est les candidats qu’ils ont investis lors des dernières législatives [de 2024]. Certains ont montré que les questions du rejet de l’autre, du racisme et des atteintes à la République n’étaient pas éloignées des considérations du RN. Mais notre enjeu dans le débat public, ce n’est pas de dénoncer les personnes, c’est de dénoncer les idées de ces personnes-là et de mettre en valeur les nôtres.
Ne vous sentez-vous pas un peu seul à porter ce discours chez LR ?
Non. Le président du Sénat, Gérard Larcher, est sur cette ligne. [L’ex-premier ministre] Michel Barnier est très clair sur la question comme le sont aussi Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand [présidents des régions Ile-de-France et Hauts-de-France]. On est nombreux à porter ce message, y compris à l’Assemblée nationale, à dire que ce sujet doit être tranché au nom d’une clarification indispensable.
Le message n’a pas été très clair lors de la récente législative partielle dans le Tarn-et-Garonne. Certains LR ont appelé à voter pour le candidat UDR-RN contre sa rivale socialiste…
La ligne du parti depuis dix ans, c’est le credo des républicains modérés sous la IIIe République : « ni réaction ni révolution ». Cette ligne-là doit être complète. Quand on dit : « Pas une voix ne doit aller à la gauche », on doit aussi entendre ce que l’on disait déjà en 2012 : « Chacun doit comprendre que nous ne voterons jamais pour le Front national. » Cela doit être clair dans nos expressions publiques au nom du parti.
Quand votre président, Bruno Retailleau, dit « Pas une voix pour la gauche » dans le Tarn-et-Garonne, ne déroge-t-il pas à cette ligne ?
Lorsqu’on lui pose la question sur l’union des droites, il répond que la politique c’est la droiture, de la conviction et que c’est non. J’ai confiance en Bruno Retailleau pour toujours dire non comme il l’a fait 2024 et le fera encore à l’avenir.
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