François-Xavier Bellamy : « Il serait pour nous inacceptable d’augmenter les impôts »
Alors que les négociations se poursuivent entre Sébastien Lecornu et la gauche politique et syndicale, le député européen et numéro deux des Républicains met en garde le premier ministre.
Le PS a fait de l’instauration d’une contribution des plus riches à l’effort budgétaire l’une des conditions de la non-censure. Sébastien Lecornu doit-il céder ?
Ce débat est fascinant… La priorité des socialistes n’est pas l’éducation, la santé, la sécurité, non c’est de créer plus d’impôts. Ce qui n’est, au mieux, qu’un moyen est devenu un but en soi. L’obsession de la gauche est manifestement d’aggraver tout ce qui met la France en faillite. Si le pays est en crise, ce n’est pas parce qu’il manque d’impôts mais parce qu’il y en a beaucoup trop. L’excès de taxes, de charges, de normes, de dettes et de dépenses publiques est à la racine de l’appauvrissement collectif que nous vivons. Pour Les Républicains, le diagnostic est clair : nous avons les prélèvements obligatoires les plus lourds de l’OCDE et ce record est en train d’asphyxier tous ceux qui travaillent et font vivre notre économie. Jouer à empiler encore de nouvelles taxes, c’est s’aveugler dangereusement sur l’urgence de la situation. Dans la négociation qui se déroule aujourd’hui, nous sommes les seuls à faire de la baisse des prélèvements obligatoires une priorité, et à affirmer qu’a minima il serait pour nous inacceptable de les augmenter. En attendant l’alternance qui permettra les réformes majeures dont le pays a besoin, Bruno Retailleau tient aujourd’hui la digue qui protège les Français de la surenchère fiscale dont rêve la gauche.
Marc Fesneau, le président du groupe MoDem à l’Assemblée, propose une sorte de retour de l’ISF avec un impôt sur la fortune « improductive »…
Personne n’a gagné les dernières élections législatives ; les socialistes ne peuvent prétendre imposer le programme du NFP. Nous pouvons réfléchir à des aménagements de la fiscalité, sur la question technique des holdings par exemple, mais hors de question d’augmenter le niveau global des prélèvements. Pour réduire le déficit, la seule voie à suivre est la baisse de la dépense publique. Alors même qu’il ne rapportait que très peu, l’ISF a pesé lourd pendant des décennies sur la compétitivité du pays. Ceux qui veulent le rétablir ont peut-être l’impression que la France est trop prospère aujourd’hui ? Notre problème est que nous sommes trop dynamiques, que nous produisons trop de richesses, que nous exportons trop… ? Ce déni de réalité est stupéfiant : alors qu’il est évident que l’addiction française à l’impôt a conduit tant d’entreprises et d’emplois à la faillite ou au départ, certains rêvent encore d’augmenter la dose. Tout ceci est confondant.
Ces mesures ont fait leur chemin dans l’opinion… Mais concrètement, que rapporteraient-elles ?
Ces mesures ont en commun de rapporter très peu et d’ailleurs, leurs promoteurs ne le contestent pas. Personne ne fera croire que ranimer l’ISF résoudra la crise de la dette. Gabriel Zucman reconnaît même que sa taxe pourrait détruire de la base fiscale, c’est-à-dire coûter in fine à la collectivité… L’argument n’est pas économique, il est moral : il faudrait « manger les riches », comme le proclame LFI. Je voudrais dire aujourd’hui mon soutien total aux entrepreneurs de France qui se battent malgré toutes les difficultés accumulées sur leur tête par des années d’incompétence au pouvoir, pour continuer de créer des emplois dans ce pays, quand une partie de la classe politique et médiatique, qui vit des impôts qu’ils paient, s’acharne à les traiter comme des délinquants. Ce climat est vraiment écœurant. Que cette campagne imprime dans l’opinion, c’est un fait. Mais j’observe que tout dépend de la question posée : les sondages montrent surtout que plus de 80 % des Français estiment que la baisse de la dépense publique est une priorité absolue ; sur ce sujet bien plus structurant que la taxe Zucman, la gauche refuse curieusement d’écouter ce cri presque unanime…
Les forces syndicales exigent également la suspension de la réforme des retraites jusqu’en 2027. Est-ce la seule voie pour éviter le blocage ?
C’est une voie sans issue. Tous les pays européens qui nous entourent adaptent leur système de retraite à la réalité démographique qui traverse le monde occidental. Les socialistes danois viennent de passer l’âge légal de départ à la retraite à 70 ans. Les socialistes espagnols, à 67 ans. Nous serions le seul pays occidental à baisser l’âge de la retraite ? Chez LR, nous n’accepterons jamais de mettre en danger l’avenir de nos enfants. Parce que c’est cela qui est en jeu. Bien sûr, cette réforme était imparfaite, et elle n’était pas la nôtre, mais elle était nécessaire. Nous pouvons y revenir, travailler sur la pénibilité, les carrières longues, les femmes et les mères qui sont aujourd’hui maltraitées par ce système. Nous n’avons cessé de défendre ces priorités, et la droite aborde ce débat sur la réforme des retraites dans un esprit de coopération. Mais la suspendre serait mettre la France en sérieux risque financier dans le contexte d’endettement déjà massif que nous connaissons. Ce serait totalement irresponsable. Nous resterons les garants de la stabilité budgétaire du pays, qui protège en particulier les Français les plus modestes.
S’agissant des mesures fiscales, quelles concessions la droite peut-elle faire pour aboutir à un accord ?
Nous sommes lucides nous n’avons pas gagné la majorité. Pour 2027, nous préparons les changements structurels qui permettront de baisser massivement la fiscalité et tout particulièrement, de rendre du salaire aux travailleurs. D’ici là, nous ne pouvons pas prétendre imposer notre agenda ; le compromis est là. Notre but est d’aider le premier ministre à créer pour les deux ans qui viennent le meilleur équilibre pour l’intérêt du pays. Mais il serait absurde d’accepter ce qui accélérerait son déclin…
Entre ces possibles concessions budgétaires, et la reconnaissance de la Palestine par la France, annoncée par Emmanuel Macron et contre laquelle s’est érigé Bruno Retailleau… Le macronisme est-il l’autre nom du socialisme ?
Cela montre en tout cas que la France a besoin d’une droite qui se reconstruise et qui s’assume. Je n’ai jamais cru à la fin des clivages : la gauche et la droite n’ont pas disparu. C’est évident sur les sujets budgétaires, sur la politique internationale, comme sur la sécurité et l’immigration. Dans les négociations actuelles, nous sommes d’ailleurs les seuls à dire l’urgence d’agir sur ce sujet déterminant pour l’avenir du pays. La droite veut rétablir les frontières pour empêcher l’immigration illégale. Ces derniers jours, la gauche veut des frontières pour empêcher les entrepreneurs de fuir le pays quand ils y appliqueront leurs taxes. Chacun ses priorités.
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